Rapa Nui, c’est un petit joyau perdu au milieu de l’océan pacifique, le bout de terre le plus isolé du monde. Les îles les plus proches, les Marquises, se situent à 2200km, tandis que la côte sud-américaine est à 3600km.
Le nombril du monde, comme le nomment ses habitants, est un rocher volcanique triangulaire de 166km² dont le sommet culmine à 510m. Une population de 4500 âmes, pour 40 000 visiteurs par an ! On comprend aisément son succès : une nature préservée et respectée, des empanadas thon-fromage à se damner, un climat plus que doux, une tradition passionnante et extrêmement présente dans le quotidien des îliens, et enfin, un patrimoine historique unique.
On attendait énormément de notre semaine de vacances sur l’île de Pâques, on a été servi au-delà de toutes espérances! Le premier orteil posé sur le tarmac (j’exagère à peine), on s’est dit qu’on reviendrait.
C’est un endroit qui sent bon. Où que l’on se balade, des effluves d’eucalyptus, d’herbes coupées, de feu de bois ou d’océan contribuent à l’étrange bien être que l’on ressent d’emblée. Nous pensions loger au camping de Hanga Roa, le moyen le plus économique de séjourner sur l’île, mais Patricio, ami de Bast et Ju, notre contact là-bas nous en a fortement dissuadé, rapport aux pluies diluviennes qui tombaient sur Rapa Nui depuis une semaine, et en prévision pour la semaine suivante… Patricio nous proposa donc d’occuper une chambre dans sa maison. Moins économique, soit, mais combien charmant. Nancy, son épouse est venue nous accueillir à l’aéroport avec des colliers de fleurs et a pris soin de nous toute la semaine! De plus, les 2 autres chambres à louer de leur pavillon étaient occupées par une famille de Santiago du Chili adorable, avec qui on ne manquera pas de rester en contact par la suite.
Précisons tout de même que durant notre séjour, nous n’avons eu qu’une heure de pluie…
Un scooter de location sous nos fesses, et nous voilà arpentant de long en large les trois uniques routes de Rapa Nui, à la découverte de ses trésors. Et quels trésors ! Baignés de mystère, des Moaïs, des Moaïs et encore des Moaïs… Il y en a partout !
Symbole de l’île de Pâques, ces statues monumentales stylisées sont l’incarnation de l’esprit des ancêtres. Ils furent érigés entre 1100 et 1600. 900 sont répertoriés : environ 400 dans la carrière de roche volcanique de Rano Raraku, où ils étaient taillés, 288 associés à des Ahu, les autels de pierres auxquels ils étaient destinés, et le reste disséminé par-ci par-là sur l’île, sans doute abandonnés en route vers un Ahu.
Certains ont encore leur gros chapeau, appelé Pukao, qui lui est fabriqué dans une autre carrière où la pierre est rouge, d’autres sont renversés face contre terre, la plupart, sont placés sur les côtes, dos à la mer.
En 1722, un certain jour de Pâques, le hollandais Jacob Roggeveen découvrit Rapa Nui. Il rapporta que les pascuans n’érigeaient plus de mononolythe, le culte de l’homme-oiseau, avait supplanté le culte des ancêtres. Jusque là, les rois, se succédaient, par hérédité. Mais à partir du XVIIe siècle, déforestation, rébellions, guerres civiles ou simple réorganisation ?…les pascuans avaient changé de rituels, et intronisaient dorénavant leur chef pour un an après une épreuve consistant à plonger dans le pacifique depuis le village d’Orongo et nager sur une sorte de planche composée de roseaux jusqu’à l’îlot Motu Nui, pour y arriver en même temps que les sternes venus nidifier. Là il leur fallait attendre la ponte du premier oeuf. Celui qui le trouvait le rapportait intact sur la grande île et désignait pour l’année le Tangata manu, « l’homme-oiseau » grand arbitre de la répartition des ressources entre les clans.
Au départ, notre arrivée coïncidait avec le début de la Tapati, la fête annuelle qui met Rapa Nui en effervescence. Mais malheureusement, la Tapati elle, s’est désynchronisée de notre planning. Au lieu de commencer le 1er février, jour de notre arrivée, le coup d’envoi fut décalé au 4 février.
Moralité, nous n’avons profité que de 4 jours de l’évènement.
La Tapati, c’est la plus importante des festivités traditionnelles de l’île de Pâques, voire, de toute la Polynésie (car, oui, l’île de Pâques fait partie de la Polynésie), qui a lieu tous les ans pendant 2 semaines, et ce, depuis le milieu des années soixante. Évoquant l’ancien culte de l’homme-oiseau, 2 jeunes femmes, cette année Céline et Lili, s’affrontent au travers de plusieurs épreuves culturelles, artisanales ou sportives afin de devenir la reine pendant 1 an. Mais attention, rien à voir avec miss France !
Ici, même si elles défilent en maillots de bain de fibres végétales créés par leurs soins, elles doivent aussi participer à un concours de natation, en traversant le lac niché dans le cratère du volcan Rano Raraku, chanter, danser avec leur équipe respective, confectionner des colliers de coquillages et de fleurs, fabriquer des corbeilles de fruits, lancer des javelots, etc.. Les clans des candidates sont composés de leur familles et amis de tous âges, ainsi que de tous les volontaires possibles… Ce qui donne par exemple des troupes de 270 danseurs sur scène pour Céline le soir de l’ouverture !
Des épreuves sportives traditionnelles comme des courses de chevaux ou de canoës sur mer ont généralement lieu dans le cadre naturel exceptionnel de l’île. Nous avons eu la chance d’assister au triathlon où des athlètes quasi nus naviguent en pirogues de roseaux, enchaînent en courant, chargés de régimes de bananes (environs 20 kg) autour du spectaculaire cratère de Rano Raraku et retraversent le lac à la nage, le tout sous le regard des moaïs.
En marge de la compétition, les plus courageux tenteront le grand défi du Haka Pe, en construisant une sorte de luge à base de troncs de bananiers, avant de dévaler une colline à plus de 80 kilomètres à l’heure. L’unique but étant d’arriver en bas sain et sauf, l’épreuve ne rapportant pas de point aux candidates… Le tout dans une ambiance joviale et bon enfant.
Finalement, le 17 février dernier, Lili a remporté le trône de Rapa Nui… Jusqu’à la prochaine Tapati, en 2013… Nous y seront sûrement !