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Entre deux tours : Moray

Quand on se balade dans la vallée sacrée, il y a des sites exceptionnels même si on ne s’intéresse ni à l’histoire, ni à l’architecture. Moray fait partie de cette catégorie. Parce que c’est beau. Et même, pour reprendre, la reprise de l’expression par Bast et Ju, c’est graphique. En plus, c’est une courte balade (les lieux ne sont pas gigantesques), que nous avons calé entre la visite des salinas de Maras, et Ollantaytambo.
Ces gradins concentriques, dont chacun des niveaux est irrigué par un savant système de canaux, servaient probablement de laboratoire d’expérimentation des cultures de l’empire. Les différents escaliers profitant de leur propre microclimat grâce à une position élaborée, il semblerait que l’on pouvait simuler une vingtaine conditions climatiques distinctes, et expérimenter le développement de plus de 250 espèces !
Les incas testaient ainsi les plants dans différentes conditions, pour ensuite améliorer leur agriculture à l’échelle du pays.
Sur les 3 amphithéâtres que l’on peut admirer, un seul est complètement restauré.

A noter :

  • pour circuler d’une terrasse à l’autre, un ingénieux dispositif de marches encastrées dans les murs
  • Environ 10 niveaux composent l’ensemble principal
  • chaque niveau mesure environ 2 m de hauteur

La triangulaire : Tambomachay, Puka Pukara et Q’enko

Si vous en avez marre des vieilles pierres taillées, je compatis car vous n’avez pas fini d’en voir… Après tout, c’était une véritable spécialité des Incas, et c’est à peu près tout ce qu’ils ont laissé comme héritage. Par contre, si vous êtes fans, vous allez encore vous régaler !

Avant d’arriver aux zig-zags de Sacsayhuaman, une promenade nous fait passer par 3 autres sites archéologiques :

Tambomachay

Avec ses fontaines, ses canalisations et ses bassins, ce lieu est surnommé le « bain de l’Inca ». On pense que c’était un lieu de culte où l’on vénérait l’eau, source de toute vie. Mais ça aurait pu tout aussi bien servir de salle de bain à l’Inca qui venait simplement y faire ses ablutions… d’où le surnom.

Puka Pukara

Située juste à côté de Tambomachay, cette ancienne forteresse, ou ce qu’il en reste, aurait servi de poste de contrôle, d’entrepôt ou de lieu de repos pour les voyageurs, ou encore, un peu de tout ça à la fois (explication très pratique qui met tout le monde d’accord). On y découvre encore une fois des assemblages de pierres assez improbables, ainsi qu’une vue spectaculaire sur la vallée en contre-bas.

Q’enko

Ce lieu assez insolite est constitué d’un immense bloc de calcaire taillé. Petits escaliers, couloirs et tunnels en zig-zag conduisent à un sanctuaire aménagé dessous où l’on découvre ce qui pourrait bien être un autel sacrificiel… une sorte d’immense monolithe trône sur une esplanade, on nous a expliqué que son ombre représenterait un puma, mais on n’a pas eu de soleil pour le vérifier…

Pisac : un mini Machu !

Si l’on ne dispose que de peu de temps dans la vallée sacrée, le site de Pisac est celui que l’on doit visiter. En plus de l’avantage d’avoir un nom facilement prononçable, c’est une excursion magnifique et complète, dans le sens où l’on peut profiter du plus beau marché artisanal du continent , sur la place du village actuel (à venir dans un prochain article), et visiter des ruines incas des plus intéressantes, surplombant le bourg, tout en jouissant d’un panorama époustouflant.
Les vestiges du site de Pisac sont donc perchés sur une crête vertigineuse, et divisés en quatre secteurs :

  •  Kinchiracay, ancien bastion fortifié, servant sans doute de refuge à la population lors d’invasions
  •  Q’Allaqasa, citadelle militaire construite sur un éperon rocheux d’où l’on domine la vallée
  •  Pisaqa, quartier résidentiel réservé à la noblesse
  •  Secteur religieux de l’Intihuasa, constitué de bâtiments dont les pierres sont admirablement taillées et ajustées et comprenant le temple du soleil et un superbe réseau de canalisations

A noter que durant la balade, on peut admirer les plus impressionnantes cultures en terrasses incas du pays (encore utilisées aujourd’hui), et qu’on traverse un tunnel obscur d’une longueur de 8 m, propice aux blagues relous de Alain, qui te ferait sursauter, déraper et dévaler la falaise, laissant ainsi le monde orphelin de ton exquise personne ;-D.

Les incas pour les nuls

Les Incas sont appelés ainsi parce qu’ils parlent Quechua, élèvent des alpagas, mâchent de la coca, adorent le dieu Inti, et ont permis aux Péruviens de boire de l’Inca-Kola.
Il s’agirait de ne pas confondre le peuple avec son empereur, nommé lui aussi Inca. C’est son titre, et en réalité, lui seul devrait porter ce nom. Il serait plus juste de parler de peuple Quechua, même s’ils n’ont pas créé le sac à dos ou la tente du même nom. Cependant, « Quechua-Kola », ça sonne beaucoup moins bien.

La naissance d’un peuple

Cusco, lithographie espagnole

Cusco, lithographie espagnole

Les Incas… pardon, les Quechuas… n’avaient pas de chevaux, pas d’outils en fer et n’avaient pas encore inventé la roue. En revanche, ils avaient sans doute inventé l’eau chaude, même si aujourd’hui encore, il n’y en a pas partout au Pérou. Ils n’écrivaient pas non plus de livres. C’est donc une légende qui raconte l’origine de ce peuple :
Le couple originel a été sorti des eaux du lac Titicaca par les dieux Viracocha, dieu créateur, et Inti, dieu du soleil. Ces deux premiers Incas ont lancé un bâton en or et fondé leur capitale à l’endroit où il est retombé, à Cuzco donc, « le nombril du monde » – ce qui représente un lancé d’environ 300 km, comme quoi, ils étaient prédisposés à réaliser de grandes choses.

Statue de Pachacutec

Statue de Pachacutec

Grands guerriers, de taille néanmoins modeste, ils s’imposèrent progressivement auprès des tribus voisines, dont la quinoa était plus appétissante. C’est après quelques siècles d’échauffourées, par un beau jour ensoleillé de l’an 1438, que l’empire Inca prit le pouvoir sous les ordres de l’Inca Pachacutec, 9ème de la dynastie, en anéantissant les derniers récalcitrants de la région. Cherchant à battre l’or tant qu’il était chaud, celui-ci poursuivit son expansion sur les hauts plateaux andins et jusqu’en Équateur dans le nord, ce qui fait, après calcul, un très long trek même équipé en Quechua !
La stratégie était d’une simplicité enfantine : fin diplomate, il proposait l’annexion à ses voisins, argumentant de manière très convaincante, sous la menace de ses forces armées. En cas de refus, évidemment, l’intervention militaire réglait le débat de manière radicale. Ainsi, l’expansion du territoire tout azimut prit des proportions phénoménales.

L’apogée d’un empire expansionniste

Au terme de sa campagne, du style napoléonien, Pachacutec avait conquis un vaste empire, Tahuantinsuyu comme on l’appelait, qui s’étendait dans les 4 directions depuis la capitale Cusco, le divisant tout logiquement en 4 secteurs : Chinchasuyu, Collasuyu, Contisuyu, Antisuyu (Nord, Sud, Ouest, Est).
Constitué d’une multitude de peuples querelleurs, il était maîtrisé par une présence militaire dissuasive et géré par une bureaucratie efficace – si tant est que ça puisse exister. Sans la paperasse, toutefois, ça reste plausible…

  • Une comptabilité rigoureuse était tout de même tenue, grâce aux Quipus, système de cordelettes à nœuds, indéchiffrables par le non-initié.
  • Les populations étaient délocalisées, calmant toute envie de rébellion, et remplacées par des colons, histoire d’imposer partout la culture inca : langue unique et culte du dieu Inti.
  • Le travail s’effectuait au service de la communauté, et le produit des récoltes redistribué aux populations. Comme quoi, Karl Marx n’a rien inventé…
  • Périodiquement, le gouvernement inca faisait la réquisition de la main d’œuvre afin de réaliser de grands travaux, remplaçant à son avantage toute forme d’impôt ou d’esclavage.
Cultures en terrasse

Cultures en terrasse

On doit ainsi à Pachacutec la construction d’une capitale imposante (dont le plan représenterait une forme de puma), des monuments importants comme le temple de Qoricancha ou encore la célèbre citadelle de Machu Picchu. Il fit construire un énorme réseau de routes, le Qhapac Nan ou « grand chemin » (connu aujourd’hui sous le nom de chemin de l’Inca), afin de communiquer rapidement avec ses provinces. Il développa les cultures en terrasse et ordonna des études d’agronomie afin d’optimiser la production agricole jusque dans les vallées les plus encaissées.

L’arrivée des conquistadors et le déclin de l’empire

Les Incas suivants poursuivirent l’œuvre de Pachacutec si bien que lorsque les premiers espagnols pointèrent leur nez en 1527, Huyna Capac était au pouvoir d’un empire qui s’étendait de la Colombie jusqu’à Santiago au Chili, recouvrant l’Equateur, le Pérou bien-sûr, la Bolivie et une partie du nord de l’Argentine (à l’époque, Le chemin de l’Inca représentait un réseau de 5000 km de routes pavées).
Comme tout un chacun, il mourut, par un jour funeste de la même année. Grande nouveauté cependant, il succomba à une maladie alors inconnue, venue d’Europe. Il laissa un empire en proie à une guerre civile, ses fils Huascar et Atahualpa, tout 2 prétendant au trône, se partageant le territoire.

Inca Atahualpa

Inca Atahualpa

Quand Francisco Pizarro débarqua en 1532, avec son armée de 180 hommes hirsutes et déguenillés, Huascar avait été fait prisonnier par son frère rival. Fort de son armée de plusieurs dizaines de milliers de guerriers aguerris, Atahualpa n’y vit aucune menace, les prenant même pour des dieux, le retour de Viracocha ayant été prédit. Une entrevue fut organisée entre Atahualpa et Pizarro, accompagné du prêtre Vicente Valverde. L’anecdote raconte que le prêtre tendit la bible à l’Inca en lui disant : « tiens, je vais te faire entendre la parole de Dieu » et que celui-ci la portant à son oreille lui répondit « je n’entends rien » et la jeta à terre. Ce geste déchaina la fureur des espagnols qui décimèrent l’armée Inca et firent prisonnier leur empereur. Une rançon fut exigée contre sa libération : autant d’or et d’argent que put contenir sa cellule. Le royaume fut ainsi pillé de ses richesses (qui n’en était pas pour les Incas pour qui l’or n’avait qu’une valeur décorative) et l’Inca Atahualpa fut exécuté malgré tout, à Cajamarca.

 

Inca Tupac Amaru

Inca Tupac Amaru

Décontenancés et décimés par les maladies (rougeole, variole,…) les indiens n’offrirent pas grande résistance à l’invasion espagnole qui s’ensuivit. Pizarro attisa même les rébellions et s’empara de Cuzco dans l’année. Dans la foulée, il fonda une nouvelle capitale sur la côte (Lima aujourd’hui). Un Inca fantoche et docile fut mis en place par les conquérants, l’Inca Manco Capac II. Cependant, ulcéré par les exactions espagnoles, il se décida à mener la révolte depuis la cité d’Ollantaytambo où il se réfugia. Il faillit réussir, mais épuisé, il fut contraint au repli dans la jungle.
Sa descendance tenta une ultime résistance, en vain. Le dernier Inca, Tupac Amaru fut capturé et exécuté en 1572, mettant un point final à la dynastie Inca.

Nazca, vol au-dessus des lignes dans un coucou

Peut-être ou sans doute avez-vous déjà entendu parler des lignes de Nazca : ces grandes lignes tracées au sol et visibles uniquement du ciel sont l’oeuvre des Nazcas, une civilisation pré-inca. Elles prennent la forme d’animaux ou de figures géométriques d’une rectitude parfaite, peuvent mesurer jusqu’à plusieurs centaines de mètres et sont restées intactes depuis !
On comprend que ce site (classé au patrimoine mondial de l’UNESCO, encore un !) en fascine plus d’un, y compris nous-mêmes ! Découvert seulement au début du 20ème siècle (aviation oblige !), les théories fusent pour en expliquer la signification. Une des plus plausibles serait que ces dessins soient destinés à des divinités. Une autre étude sérieuse montrerait que ce serait un calendrier astronomique, les figures s’alignant sur les constellations. Bien-sûr, les plus farfelus y voient des messages à destination des extra-terrestres…
Nous avons donc cassé notre tirelire afin d’embarquer dans un petit avion qui nous fera faire le tour des lieux. Et nous voilà partis pour une promenade d’une demi-heure dans les airs qui mettra l’estomac des plus sensibles à rude épreuve (Al a su apprécier le sac plastique mis à disposition…), mais quel spectacle !